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Du Campo-Giro à l’Astra 400, une journée au stand

samedi 27 juillet 2019, par Marc "Closdelif" Barret

C’est tout simplement l’histoire de quatre copains qui se sont simultanément trouvé propriétaires soit d’un Campo-Giro, soit d’un Astra 400, soit des 2.

Maintenant, un peu d’une histoire qu’on ne se lasse pas de raconter !

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Nous avons d’abord réuni notre collection chez l’un d’entre nous :

L’aventure débute en 1903 sous la forme de prototypes dessinés par le lieutenant- colonel Venancio Lopez de Ceballos y Aguirre, comte de Campo Giro. Enfin, en 1910, les premières armes sont produites en série (environ 1000 ex.). Elles chambrent le 9 mm Largo, mais la mise au point continue jusqu’en 1913. L’arme sera rapidement adoptée par l’armée espagnole dans sa seconde version « modelo 1913-16 » (1914) et produite en 15 000 exemplaires toutes versions confondues, notamment aux établissements Espéranza y Unceta [1], qui allaient devenir en 1926 : Unceta y Cia. Une nouvelle version de l’arme est mise en fabrication dès 1916, puis une ultime en 1921. Cette dernière version ne fut pas réellement produite industriellement car la firme était en train de mettre au point son modèle 400 , immédiatement adopté comme nouvelle arme réglementaire par l’Espagne.

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Le Campo Giro : c’est le grand ancêtre de toute une lignée promise à un succès mondial ! Voici celui de l’essai :

Autant le Campo Giro était inutilement complexe et délicat, autant l’Astra (marque commerciale depuis 1914), était de conception simple, robuste et extrêmement bien conçue. Il fonctionnait par simple culasse non calée (Blow Back) grâce à une très lourde glissière retenue par un puissant ressort récupérateur. Cet Astra 400, chambré pour la 9 mm Largo, fut rapidement remarqué pour sa capacité à avaler toutes sortes de munitions avec un égal bonheur : 9 mm Bergman Bayard (ou Largo), 9mm Steyr, 9mm Browning long, 38 Colt (rimless smokeless ou super auto) et enfin, 9 mm Parabellum [2]. Il reçut donc le surnom de « Mangetout » ainsi que celui d’« El Puro » dû à la forme particulière de sa glissière qui le faisait ressembler à un gros cigare (puro en espagnol). Cette arme connut un grand succès et fut fabriquée jusqu’en 1946 en 105 000 exemplaires, auxquels il faut rajouter les 59 000 modèles Astra 600 réalisés en 9mm Parabellum pour l’Allemagne (similaires mais un peu plus courts cependant) et les quelques milliers d’armes fabriquées par les Républicains pendant la guerre civile (Terrassa Ascaso et R.E. en particulier.).

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les 3 Astra 400

 

Au stand de tir !

Pour cette journée d’exception, nous disposions d’un rare Campo Giro, de plusieurs Astra 400 et d’un Tarrasa Ascaso.
A tout seigneur tout honneur, je commençais par l’ancêtre de la lignée, le Campo-Giro.
Arrivé à la table du 25 mètres, je prépare mon arme et garnis sans difficulté le chargeur à 5 coups comme à mon habitude. Une fois le pistolet bien chaussé, on remarque que les minuscules organes de visée ressortent correctement sur un fond blanc, mais deviennent totalement invisibles sur le noir d’un centre de C50.
La pente de la crosse est acceptable pour une prise de visée mais un peu raide, elle casse tout de même le poignet. Le départ est véritablement détestable : long, grattant et dur...pour se terminer par un lâcher sans consistance. Les premiers résultats sont nuls et je me décide à utiliser une C 50 « améliorée » par l’ajout d’un centre blanc, les résultats progressent un peu, mais je dois arrêter le tir à cause du du stress causé par les multiples enrayages du modèle essayé. Je tiens tout de même à préciser que dans tous les cas la balle a atteint la C50, mais ne réalisant parfois qu’un deux ou un trois ! Ce Campo Giro a manifestement connu des jours meilleurs et sa fiabilité s’est montrée très marginale lors de nos essais, sans que les problèmes puissent être imputés à nos cartouches qui ont donné entièrement satisfaction avec les Astra 400 et l’Ascaso.
A ce sujet d’ailleurs, chacun avait amené et préparé son lot de cartouches, préparées aux petits oignons ; afin de tenter d’être objectifs, chaque arme fut testée avec tous les lots et seul le Campo Giro nous posa quelques problèmes. L’ensemble des « 400 » se montra fidèle à sa réputation de « Mangetout » et fonctionna sans faille avec toutes les douilles et rechargements...la seule différence fut la distance d’éjection des douilles !

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Le superbe stand

Pour ma part, je fournis deux lots rechargés comme suit :
- douille 9 mm Largo, balles FMJ de 8 grammes propulsées par 0,30 grammes de A0, chargement suffisant pour cycler l’Ascaso, un peu léger pour les Astra.
- idem, mais 0,43 de la même poudre selon la recommandation de l’ouvrage de Malfatti : inutilement puissant mais précis. Les douilles restent fichées dans le plafond du stand de tir ! Les Astra 400 aux ressorts récupérateurs plus raides et plus longs apprécièrent beaucoup cette recette.

Les deux suivants dans notre programme d’essais furent les Astra 400. L’un était en parfait état et l’autre avait plus vécu, mais les deux fonctionnèrent à merveille. La prise en mains est désormais un peu plus naturelle mais les départs restent durs. Les organes de visée sont en progression aussi, tout en restant trop fins pour obtenir facilement de bons résultats...Cependant, les uns comme les autres, nous parvînmes à rester dans le visuel de la C 50 à 25 mètres.
Il faut savoir que ces lourdes armes fonctionnent avec une longue culasse non calée : aussi le recul en est-il assez puissant sans être cassant cependant. En guise de bilan, ce sont des armes très bien construites, assez précises et fort agréables à utiliser. La qualité d’exécution est proprement surprenante avec un bronzage aussi beau qu’un Luger de la bonne époque (avant la WWI). Le démontage est très simple, voire encore plus facile que celui d’un Browning 1910 dont il utilise une partie du principe, l’autre partie étant directement héritée du Browning 1903. Finalement, presque seule l’esthétique vient du Campo Giro. Il est tout de même bon de remarquer que les rails de guidage de la glissière sont très longs et inversés par rapport au schéma Browning-Colt, et ce n’en est que mieux pour la précision. Enfin, concernant l’assemblage de ces modèles, on notera l’usage de goupilles en L bien plus faciles à extraire et remettre en place que les traditionnelles goupilles droites.

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L’auteur un moment avant le 10

L’Ascaso, ou Astra-Ascaso, ferma la marche ce jour là :

C’est le plus rare de cette confrontation et l’exemplaire dont nous disposions était en parfait état.
Ce modèle fut réalisé pendant la guerre civile et à partir de 1937 par les Républicains. Il fut fabriqué dans la région de Barcelone, à Tarrasa pour être exact, dans un arsenal dont l’immense majorité des ouvriers était syndiquée à la CNT, ce en environ 5000 exemplaires seulement (8000 selon d’autres sources non vérifiées). Son appellation fut choisie en la mémoire du militant anarcho-syndicaliste Francisco Ascaso, tué le 20 juillet 1936 lors de l’assaut de la caserne d’Atarazanas à Barcelone.
Le nom d’Ascaso est gravé dans un ovale sur le dessus de la culasse. Sur la glissière, on trouve également un marquage « F.ASCASO TARRASA CATALUNA »,

Les républicains produisirent aussi une autre copie à Alginet, région de Valence, le « R.E » ( Republica Española ). La seule différence extérieure d’avec les Astra 400 était les plaquettes de poignée et, bien sûr, les marquages ; intérieurement on notera simplement que les pas de rayures des canons n’étaient pas les mêmes.
Cette production d’une assez bonne qualité se caractérise par des plaquettes en bakélite noire striées verticalement et portant au centre, les lettres « RE » entrelacées (pour Republica Espaniola), et également apposées sur la glissière.

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Ces PA sont encore classés en catégorie B. l’UFA demande leur déclassement au titre des armes historiques et de collection. Voir article.

On trouve en outre une étoile à 5 branches poinçonnée sur le pontet. Environ 15 000 exemplaires ont été réalisés
Ces copies du gouvernement républicain en zone loyaliste ne comportent aucun marquage d’une épreuve de banc et leurs traitements de surface différeront du modèle original.
En outre, la qualité de finition était plus rustique, ce qui se conçoit parfaitement bien, s’agissant de production de guerre.
Pour notre essai, ce fut l’arme qui supporta les charges les plus faibles sans enrayages, ce qui fut favorable à l’obtention de scores très honorables sur nos C50.

Conclusion

Outre une excellente ambiance lors de cette journée mémorable, nous garderons tous à l’esprit ce regroupement peut être unique de ces armes espagnoles originales, fiables et puissantes. Leur potentiel de précision est encore respectable ; j’en veux pour preuve les nombreuses modifications d’organes de visée réalisées par nos voisins Ibériques afin d’en tirer la quintessence face aux C 50 !

Sources :
- Wikipédia.
- Pistolets du monde entier de Ian Hogg & John Weeks (ed. de Vecchi)
- Pistolas y subfusiles de la Republica, produccion de guerra de J Abad,M.Estirado & F. Fuentes.
- Blue Book of Gun Values de S.P. Fjestad. (B.B. Publications).

Notons qu’il y eut aussi « La mystérieuse cartouche de 9 mm Campo-Giro (jugée d’une vélocité supérieure à la 9mm Bergmann-Bayard, ce qui pourrait être dû au canon plus long du Campo-Giro) et similaire à la 9 Largo fabriquée par la firme Pirotecnia Militar de Sevilla, mais néanmoins différente.

 

[1Les établissements Espéranza y Unceta furent installés initialement à Eibar, puis à Guernica où l’usine échappa au célèbre bombardement.

[2Cela n’est pas une légende, j’en ai fait l’expérience avec mon exemplaire fabriqué en Catalogne pendant la guerre civile : l’Astra 400 mérite bien son surnom de « Mangetout ».

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