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Rapport N°2929 de C. Bodin au nom de la Commission des Lois
Le droit de propriété selon Claude Bodin
Annexe au mémento du 16 novembre 2010
mercredi 15 décembre 2010, par
Se référant à une jurisprudence spécieuse du Conseil d’État, fondé sur un syllogisme digne d’un régime totalitaire, Le rapporteur de la Proposition de Loi propose de violer le droit de propriété et le droit d’héritage pour les armes à feu.
Le Conseil d’État perfidement avait cantonné ce viol de la Constitution, aux seules armes soumises à autorisation. Claude Bodin entend l’étendre aux armes soumises à déclaration.
Extrait du Rapport N°2929 de Claude Bodin
L’héritage :
Le second alinéa du IV tire les conséquences de l’obligation d’obtenir une autorisation pour l’acquisition et la détention des armes classées en catégorie B.
Cette disposition oblige en effet les personnes ne disposant pas d’une autorisation à se dessaisir d’une arme de catégorie B dont elle serait devenue propriétaire par voie successorale ou testamentaire, dans les trois mois à compter de la mise en possession.
Ainsi, la rédaction adoptée par la Commission à l’initiative de votre rapporteur maintient une règle déjà édictée au II de l’article L. 2336-1 du code de la défense en vigueur et qui constituent, dans une certaine mesure, une exception dans l’application des règles de mutation du droit de propriété. En effet, en application de l’article 724 du code civil, « les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; les légataires et donataires universels sont saisis dans les conditions prévues au titre II » du code civil. En vertu de cet article, le transfert du droit de propriété est, en principe, accompli à l’ouverture de la succession et les héritiers peuvent jouir des biens ainsi légalement acquis.
Par dérogation, l’article L. 2336-1 du code de la défense suspend le droit de jouir d’une arme acquise par héritage à la possession d’une autorisation d’acquisition et de détention. Cette règle trouve sa justification dans des considérations touchant d’abord à la sécurité publique mais également à une certaine logique juridique.
Sur ce plan, il convient tout d’abord de souligner le caractère personnel de l’autorisation délivrée par les préfectures pour l’acquisition et l’autorisation d’une arme de catégorie B : ce titre est accordé en considération de la capacité supposée d’un individu donné à détenir une arme sans dommage pour lui-même ou pour la sécurité d’autrui ; il ne vaut pour les familiers de son titulaire.
Ensuite, on peut légitimement s’interroger sur l’exacte portée du droit de propriété s’exerçant sur un objet dont l’acquisition et la détention seraient conditionnelles puisque soumises à autorisation des pouvoirs publics. C’est en tout cas en suivant un tel raisonnement que dans un arrêt [1] le Conseil d’État a écarté le moyen fondé sur l’atteinte illégale au droit de propriété. Le Conseil estimait en l’espèce que seul importait le régime applicable à la catégorie dans laquelle était classée une arme, le mode d’acquisition de celle-ci (par voie successorale) étant indifférent. De surcroît, le Conseil d’État tend à admettre certaines restrictions à l’application du droit de propriété en considération de la nature singulière des armes à feu et des impératifs de sécurité publique. Cette position affirmée transparaît notamment dans l’arrêt rendu par la section du contentieux [2], arrêt dans lequel il est affirmé : « en posant des conditions à l’acquisition et à la détention par des particuliers de matériels de cette nature [des matériels de guerre de 2e catégorie acquis à des fins de collection], qui ne sauraient, notamment en raison de leur usage antérieur, être regardés comme des objets ordinaires, le pouvoir réglementaire n’a pas porté au droit de propriété garanti par les stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis, compte tenu des exigences de l’ordre et de la sécurité publics qui s’imposent à lui ».
Dans ce même esprit, la Commission a adopté l’amendement présenté par votre rapporteur et destiné à étendre le champ d’application des restrictions du V de l’article 3 aux armes classées en catégories C et D qui, vraisemblablement, représentent du reste une part plus importante du commerce et de l’industrie des armes à feu.
Extension du champ des saisies administratives
L’article 9 de la proposition de loi adopté par la Commission a pour objet d’élargir le champ d’application de la procédure de saisie administrative prévue à l’article L. 2336-5 de la défense à l’ensemble des armes et d’assurer la transposition des nouvelles catégories.
Peines complémentaires
Les articles 10 à 24 de la proposition de loi ont pour objet de mettre en œuvre la proposition n° 9 de la mission d’information sur les violences par armes à feu, tendant à « garantir le prononcé des peines complémentaires d’interdiction d’acquisition et de détention d’armes à des fins préventives dans le cas de certaines condamnations, même minimes, sauf décision contraire motivée » et à « établir des peines mieux proportionnées et plus dissuasives par leur sévérité »
Obligation de prononcer les peines complémentaire
La durée maximale des peines complémentaires automatiques d’interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et de retrait du permis de chasser avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis est portée de cinq à quinze ans (amendement CL19).
Incriminer, pour toutes les catégories d’armes, le port ou le transport d’armes sans motif légitime.
Actuellement, le port et le transport d’armes illégitimes sont sanctionnés pour certaines catégories d’armes seulement : les armes des 1re, 4e et 6e catégories par l’article L. 2339-9 du code de la défense, et les armes des 7e et 8e catégories par l’article 112 du décret du 6 mai 1995 (43). Le port ou le transport sans motif légitime des armes des 2e, 3e et 5e catégories n’est donc pas incriminé. Outre le caractère incomplet du champ des armes dont le port ou le transport sans motif légitime sont pénalement sanctionnés, le niveau des peines prévues par les deux textes précités apparaît peu cohérent et insuffisamment dissuasif.
Le texte prévoit que le port ou le transport de matériels de guerre, d’armes ou de munitions sans motif légitime sera puni des peines suivantes :
cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende « s’il s’agit de matériels de guerre mentionnés à l’article L. 2331-1, d’armes, de leurs éléments essentiels ou de munitions, des catégories A ou B » (1° du I) ;
deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende « s’il s’agit d’armes, de leurs éléments essentiels ou de munitions de la catégorie C » (2° du I) ;
un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende « s’il s’agit d’armes, de munitions ou de leurs éléments de la catégorie D » (3° du I) (= toutes les armes de chasse et de collection).
L’article 32 bis vient créer dans le code de la défense un nouvel article L. 2339-11-1 prévoyant pour ces infractions les trois peines complémentaires aux armes présentées précédemment :
L’interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation, pour une durée de cinq ans au plus (1°) ;
La confiscation d’une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition (2°) ;
Le retrait du permis de chasser avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant cinq ans au plus (3°).