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La loi du 7 août 1942
Rendre les armes en 1942
jeudi 9 septembre 2021, par (publié initialement le 12 juin 2011)
La loi du 7 août 1942 punit de mort celui qui détient un dépôt d’armes, engins meurtriers ou incendiaires. La loi du 3 décembre 1942 interdit la détention et le transport de toute arme à feu et munitions y compris de chasse.
Notre image : les détenteurs devaient les déposer dans les mairies,
tels ces français qui remettent des ustensiles en laiton pour payer leur impôt métal .
- Dès le 1er avril 1942 une ordonnance de l’occupant à enjoint la population à déposer les armes.
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Nous avons souvent été interrogés par les héritiers de ces "donateurs obligés" qui cherchaient s’ils pouvaient récupérer ces armes et à savoir où pouvaient avoir été conservés les registres.
En 30 ans de recherches, nous n’avons rien trouvé. Les armes se sont "évaporé", les registres mal tenus ont été détruits etc... Seul fait matériel, ces récépissés que l’on nous envoie de temps en temps.
Extrait de la thèse de doctorat soutenue par Maître Jean-Paul LE MOIGNE.
Dès l’entrée des troupes allemandes sur le territoire national français, une ordonnance du 4 juillet 1940 interdit la détention des armes :
Toutes les armes à feu et munitions, grenades à main, explosifs et autres matériels de guerre sont à remettre.
La remise doit s’effectuer dans l’espace de 24 heures (c’est-à-dire à partir de la publication ou de la proclamation de cette ordonnance) auprès du prochain commandement de place ou de camp, à moins qu’il n’y ait d’autres prescriptions d’ordre local. Les maires (préposés de communes) sont tenus pleinement responsables de la mise en exécution exacte. Les Chefs de troupe sont autorisés à accorder des dispenses.
Toute personne possédant des armes à feu, munitions, grenades à main, explosifs ou autres matériels de guerre, à l’encontre de la présente ordonnance, sera punie de la peine de mort ou de travaux forcés, en cas plus légers de prison.
Toute personne commettant des actes de violence, quels qu’ils soient, contre l’armée allemande ou un de ses membres sera punie de mort. [1]
Un deuxième texte s’adressait aux habitants des pays occupés le 20 juin 1940, intitulé dépôt des armes de chasse :
L’armée allemande garantit aux habitants pleine sécurité personnelle et sauvegarde de leurs biens. Ceux qui se comporteront paisiblement et tranquillement n’ont rien à craindre. […]
Par décret spécial, la remise des armes à feu et du matériel de guerre a été ordonnée. Ce décret ne s’applique pas à des armes souvenirs hors d’usage. Les armes de chasse devront être remises en indiquant le nom, la profession et le domicile du propriétaire au maire responsable, qui prendra soin de ce dépôt. [2] […]
- Ceux qui remettaient les armes recevaient un récépissé tout à fait informel.
En pratique, comme ils le firent dans les départements du nord et de l’est de la France en 1914 sans pouvoir récupérer leurs biens à la fin de la guerre, [3] les Français apportèrent en masse les armes dans les mairies, les commissariats et les « Kommandanturen », parce que les lois en vigueur prescrivaient les sanctions les plus sévères dont la peine de mort. Les armes ne sont pas étiquetées et l’on ne délivre pas de reçu, sauf à Paris et dans quelques autres localités. Parfois, on va ouvrir un registre avec le nom des déposants. On ne va pratiquement jamais mentionner les numéros ou les particularités des armes, faute de temps.
Dans une deuxième période, les Allemands ordonneront le regroupement des armes dans un ou plusieurs dépôts par département. Dans ces dépôts, les armes stockées, souvent dans une effroyable confusion, sont soumises à de rudes conditions et leur conservation dans de bonnes modalités apparaît compromise. [4]
Sur le plan de l’évaluation statistique, à la fin de l’année 1941 une estimation partielle faisait état de 700 000 armes remises dont 100 000 devaient prendre le chemin de l’Allemagne. [5].
Une première opération faite à l’époque à titre de sondage dans l’un des dépôts d’armes consignées aux autorités allemandes, avait permis de retrouver les noms et adresses des propriétaires de plus de 6 000 fusils de chasse. [6]
L’ordonnance du 5 mars 1942 [7] précise l’interdiction édictée par celle du 10 mai 1940. Sont notamment et explicitement interdites à la détention : les armes de chasse et les pièces détachées des armes et matériels précédemment prohibés. Toutefois, des exceptions sont prévues. L’interdiction ne s’appliquera pas :
Aux armes et munitions dont le port est autorisé par une autorité allemande pour raison de service ;
Aux armes et à tout autre matériel de guerre qui ont été laissés à leur détenteur en vertu d’une autorisation écrite, délivrée par une autorité allemande ;
Aux armes-souvenirs non utilisables ;
Aux carabines à air comprimé d’un calibre de 4,5 mm.
La productivité des remises volontaires ayant été jugée insuffisante, un délai supplémentaire a été accordé au paragraphe 4 de l’ordonnance du 5 mars 1942. Les armes devront être remises avant le 1er avril de cette année là.
L’ordonnance du 5 juin 1942 prescrit la peine de travaux forcés ou d’emprisonnement aux détenteurs des armes et matériels (définis à l’article premier de l’ordonnance du 5 mars 1942) au contrevenant qui sera poursuivi à la suite d’une dénonciation faite contre lui par son conjoint, ses parents, ses enfants, ou ses frères et sœurs .
Une ordonnance allemande du 18 décembre 1942 « concernant la sauvegarde de l’autorité occupante », prise après l’invasion de la Zone sud, reprendra les interdictions qui visent les armes mises en place par le gouvernement de l’État français.
Témoignage : Un de nos adhérents qui à vécu ces évènement nous indique qu’il a acheté son premier fusil chassepot dans le magasin de René Johnson qui tenait un magasin « Le Bon Vieux Chic » près de la Samaritaine en face du Pont Neuf à Paris. Et le jour de son achat, le magasin était plein d’officier allemands. Ainsi les armes anciennes étaient autorisées par les Allemands et valaient le prix d’un paquet de cigarette [8]. Après la libération, on trouvait à la « foire à la ferraille du Bld Richard Lenoir » à Paris, des carabines de tir Allemande en calibre 8.15x46. |
Rel. L- 23/06/21
[1] Ordonnance du 10 mai 1940 sur la possession d’armes en territoire occupé, Verordnungsblatt für die besetzten französischen Gebiete, n° 1, 4 juillet 1940, p. 4.
[2] « Dépôt des armes de chasse », in Le Saint-Hubert, organe officiel du Saint-Hubert-Club de France, n° 2, 38e année, mars 1940, p. 38.
[3] « La restitution des armes de chasse déposées aux autorités allemandes », in Le Saint-Hubert, organe officiel du Saint-Hubert-Club de France, n° 4, 40e année, juillet-août 1941, p. 37.
[4] « Le dépôt obligatoire des armes de chasse en zone non occupée », in Le Saint-Hubert, organe officiel du Saint-Hubert-Club de France, n° 1, 42e année, janvier-février 1943, p. 1.
[5] « Le recensement des armes de chasse », in Le Saint-Hubert, organe officiel du Saint-Hubert-Club de France, n° 6, 40e année, novembre-décembre 1941, p. 65
[6] « Le recensement des armes de chasse. Premiers résultats », in Le Saint-Hubert, organe officiel du Saint-Hubert-Club de France, n° 1, 41e année, janvier-février 1942, p. 1.
[7] Ordonnance du 5 mars 1942 concernant la détention d’armes, Verordnungsblatt des Militärbefehlshabers in Frankreich (VOBIF), n° 56, 18 mars 1942, pp. 351-352.
[8] 100 Francs de l’époque.