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Nous avons été alertés récemment par des tireurs que les dirigeants de leurs clubs avaient été invités, par courriel, à communiquer des renseignements d’ordre privé sur les membres de leurs clubs de tir.
Cette demande émanait de responsables d’un « Service Officiel » qui demandaient de nombreux éléments d’ordre privé : profils des licenciés : majeurs/mineurs, homme/femme, catégories socio-professionnelle, compétiteurs ou non.
motivations des licenciés : compétition, familiale, professionnelle.
détection d’incidents, incohérences juridiques... recours.
convention du club avec d’autres associations ou entités.
Les interrogations portaient également sur la capacité de membres de groupes radicaux (UD - UG - Survivalistes... radicalisés religieux.) à s’inscrire auprès d’associations pour la licence et les autorisations d’acquisition et détention.
A la lecture de ces demandes de profilage, on constate qu’aucun motif légitime ne les justifie. Ce qui est contraire à la protection des données individuelles assurée par la CNIL.
Que ces courriels demandent par ailleurs à leurs destinataires un avis personnel sur des éléments d’ordre privé, interpelle sur la capacité des dirigeants de club de tir d’apprécier et de rendre compte de ces données, à un tiers, quel que soit son statut.
Que dit la loi dans ce contexte ?
L’article R312-85 du CSI [1] précise au VI :
« VI. − L’interdiction prévue au I de l’article 6 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés s’applique au traitement mentionné à l’article R. 312-84.
Par dérogation, sont autorisés, en cas de nécessité absolue pour les seules fins et dans le respect des conditions applicables à ce traitement, la collecte, la conservation et le traitement de données strictement nécessaires, adéquates et non excessives qui figurent dans l’enquête administrative mentionnée au V et relatives :
1° Aux opinions politiques, aux convictions religieuses, à l’appartenance syndicale ou à la santé de la personne faisant l’objet de cette enquête administrative ;
2° A la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, aux convictions religieuses, à l’appartenance syndicale, à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle d’une personne autre que celle faisant l’objet de l’enquête administrative mentionnée au V, sous réserve que ces données se rapportent à une procédure dans laquelle la personne faisant l’objet de l’enquête administrative est mise en cause.
Il est interdit de sélectionner dans le traitement mentionné à l’article R. 312-84 une catégorie particulière de personnes à partir des seules données mentionnées aux 1° et 2°. »
En résumé on ne peut collecter des informations de ce type, par dérogation qu’en cas de nécessité absolue.
Pour aller plus loin
Si on pousse l’analyse plus loin il faut se référer au recueil de procédures de la CNILconcernant les « tiers autorisés » publié le 10 juillet 2020.
Ce document précise que certaines autorités ont le pouvoir d’exiger des organismes, la transmission de documents ou de renseignements pouvant comprendre des données personnelles, ce sont des « tiers autorisés ».
Or le « tiers autorisé » doit impérativement, pour avoir accès aux données, établir une demande de communication écrite précisant le fondement légal de la demande ; incluant le contrôle de la qualité du tiers autorisé à l’origine de la demande.
Il doit s’assurer de l’application de mesures de confidentialité afin de sécuriser l’échange ; et de la conservation d’une traçabilité des échanges et des vérifications réalisées.
En résumé le document sur lequel nous avons été alertés, ne répond à aucun de ces critères et sa légitimité est à la marge de la légalité.
On peut se demander s’il s’agit là d’une initiative malheureuse d’un agent de l’État frappé d’excès de zèle ou si ce type de courrier va se généraliser et venir s’entasser dans les boites aux lettres des dirigeants des clubs de tir.
En cas de d’arrivée massive de courriels de ce type, n’hésitez pas à nous faire remonter l’information.
Quand aux dirigeants des clubs, rien ne les oblige à devenir des supplétifs serviles des services de police de l’État. D’autant plus que si les adhérents des clubs les ont élus, c’est parce qu’ils avaient totalement confiance en eux.
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[1] Créé par le décret n°2020-487 du 28 avril 2020,