Article paru dans la GA n° 467 de septembre 2014

La Carte du collectionneur, une rentrée pleine d’attentes...

lundi 22 septembre 2014, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Un peu comme l’Arlésienne, tous les collectionneurs attendent la mise en place de la Carte du Collectionneur. Ils l’espèrent pour pouvoir être enfin l’égal des tireurs et des chasseurs pour l’accès aux armes de la catégorie C, comme l’ont décidé les parlementaires. Mais il y a l’administration...

Et puis il y a toujours le décret sur la dangerosité avérée qu’il convient de « toiletter ». Comme d’habitude il y a les bavures des uns et des autres.

La Carte du Collectionneur est bien un sujet qui préoccupe l’administration.
Déjà, lors du passage de la loi en 1ère lecture au Sénat (Le 8 décembre 2011), nous avions dû négocier la mise en place d’une sensibilisation aux règles de sécurité (voir ci-dessous). Nous trouvions cela inadapté pour des armes non destinées à être utilisées. Mais l’administration y tenait. En contrepartie, nous avons obtenu qu’une extension de la liste des armes postérieures à 1900 classées en catégorie D soit mise à l’étude (extension de la « nouvelle 8ème catégorie » de 1986).

Puis, début juillet 2013, l’administration a sollicité de la part de notre association des propositions sur l’organisation de la mise en place de la Carte du Collectionneur. Nous les avons présentées en moins de deux semaines. Depuis cette date, ce sujet n’a fait l’objet que de seulement deux réunions et de quelques échanges téléphoniques.

En fait, l’administration est embarrassée pour appliquer les dispositions prévues par la loi pour la Carte du Collectionneur. Sa crainte est de voir s’engouffrer dans le dispositif des « gens » qui ne sont pas collectionneurs et qui profiteraient de la situation pour acquérir des armes de la catégorie C pour d’autres motifs que la collection. Ce serait « l’effet d’aubaine » !

Dans nos propositions nous avions bien prévu cette situation avec tout un processus qui permettrait de séparer le « bon grain de l’ivraie ».

De notre point de vue, c’est très simple. Mais l’administration ne le voit pas ainsi et hésite pour appliquer les dispositions de la loi relatives à la Carte du Collectionneur. Elle trouve que les parlementaires ont été trop généreux et trop précis dans les dispositions de la loi, ne laissant pas suffisamment de marge sur son application.

Un intérêt limité

Rappelons que, telle que prévue par la loi, la Carte du Collectionneur n’ouvre que deux droits :
- acquérir des armes de catégorie C,
- pour ceux qui la demanderont dans les 6 mois suivant la publication du décret, rendre légale la détention d’armes de catégorie C déjà détenues et qui n’ont pas été déclarées.

Mais l’acquisition d’une arme de catégorie C peut être faite par une simple présentation d’un certificat médical de moins d’un mois. Les titres sportifs, permis de chasser ou carte du collectionneur suppléent simplement au certificat médical (Voir Code de la Sécurité Intérieure).

D’ores et déjà, il n’est donc pas nécessaire d’avoir la Carte du Collectionneur pour acquérir des armes de la catégorie C. Son seul intérêt serait donc d’éviter d’aller voir son médecin à chaque achat d’une arme de la catégorie C.
Au contraire, nous trouvons que la Carte du Collectionneur apporte une sécurité au système : le collectionneur titulaire de la carte devra être « agréé » au préalable. Ce qui n’est pas le cas de celui qui apporte un « certificat médical ».
Ces « tergiversations » à l’égard des armes de catégorie C paraissent excessives. On se souvient que jusqu’en 1995 elles n’étaient soumises à aucune restriction d’acquisition et de détention pour tous les citoyens majeurs, même pour les carabines semi-automatiques, aujourd’hui classées en catégorie B quand elles comportent un chargeur amovible ou un magasin fixe de plus de 2 cartouches. Seules les armes vendues en armurerie étaient simplement enregistrées sur le registre de l’armurier conservé 10 ans. A l’époque ces armes n’ont guère troublé l’ordre et la sécurité publique. Peut-être qu’aujourd’hui la société a évoluée dans le sens d’une violence accrue. Il est probable que le souci de l’administration est de « surveiller » les armes pouvant être utilisées dans les guerres de bandes ou les émeutes urbaines.

Dernier inconvénient de la Carte : elle créerait une disparité entre les collectionneurs « purs » et les sportifs : les armes de catégorie C ne seraient détenues par les premiers que pendant la période de validité de la carte (10 ans renouvelables) alors que les tireurs sportifs ou chasseurs, qui ont déclaré une arme de catégorie C, peuvent la conserver à vie.

Craintes injustifiées

Sans doutes ces craintes sont-elles un peu excessives, car nous voyons mal un individu animé de mauvaises intentions suivre le processus d’attribution de la carte du collectionneur, du permis de chasser ou de l’attribution d’une licence de tir, pour acquérir une arme de la catégorie C, qui ne sera au bout du compte qu’une arme longue à répétition manuelle ou à un coup. Cela d’autant moins qu’il peut acquérir une arme sur simple présentation d’un certificat médical de moins d’un mois. En outre, pour ce type d’individu il y a des moyens plus discrets et « moins contraignants » pour se procurer des armes autrement plus performantes que la loi classe dans les catégorie A ou B, ce dont les medias font des « gorges chaudes. »

Conditions d’obtention de la carte du collectionneur
Ces conditions sont définies par la loi (Art L312-6-1 Code de la SI) du code de la Sécurité Intérieure.]. Il faut :
- être un véritable collectionneur en exposant dans des musées, participer à la connaissance ou l’étude des armes, ou simplement réaliser une collection.
- être majeur, ne pas avoir été condamné et « ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l’arme ou du matériel dangereuse pour soi-même ou pour autrui. »
- « produire un certificat médical attestant que son état de santé physique et psychique n’est pas incompatible avec la détention de ces matériels, armes ou munitions. »
- justifier « avoir été sensibilisé aux règles de sécurité dans le domaine des armes. » C’est une notion qui reste encore à définir.
Régularisation d’armes de catégorie C déjà détenues
Nous nous sommes fais largement l’écho des possibilités de l’Art. 49 du décret qui permettait de régulariser les armes de catégorie C sans avoir à en prouver l’origine. Notons que le décret émane du pouvoir exécutif, pour appliquer la loi.
La loi a prévu un dispositif spécifique aux collectionneurs(3) : « Dans un délai de six mois à compter du 6 septembre 2013, les personnes physiques et morales détenant des armes relevant de la catégorie C qui déposent une demande de Carte du Collectionneur d’armes et remplissent les conditions fixées aux articles L. 312-6-1 et L. 312-6-2 sont réputées avoir acquis et détenir ces armes dans des conditions régulières. »
Déjà impossible de régulariser dans les six mois tels qu’ils sont définis par la loi, le « décret collectionneur » n’est toujours pas paru. Dès sa publication, les collectionneurs qui « déposeront » une demande de carte, seront « réputés » les détenir légalement. Notez bien qu’il y a deux conditions : remplir celles définies par la loi et déposer une demande. Si la demande n’aboutissait pas pour n’importe quel autre motif, du moment que les deux conditions sont remplies, tout est en ordre...