Article paru dans la gazette des armes 524 de novembre 2019

L’ère du numérique pour les armes : SIA

samedi 16 novembre 2019, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Le numérique envahit notre quotidien, voilà des années que l’administration nous y habitue petit à petit. Nous avions notre espace personnel Amélie pour la sécurité sociale, impots.gouv pour les impôts, chez nos banques, assurances, etc. Désormais, les amateurs d’armes détenteurs de modèles déclarés ou autorisés auront leur espace personnel sécurisé, et les armuriers auront leur registre de stock en ligne.

Il ne s’agit pas de dire si c’est bien ou mal, mais le tout numérique est bien à l’ordre du jour et nous n’avons pas le choix. En dehors du fait que les débuts vont être difficiles, quand tout fonctionnera correctement, le travail des professionnels et de l’administration s’en verra grandement simplifié. Le « compte détenteur » sera « individuel et personnel » et devrait être nickel, ce qui n’est pas le cas pour le fichier AGRIPPA qui aujourd’hui, est devenu obsolète.

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Entre autres, le SIA sera alimenté par les préfectures pour les autorisations et par les armuriers pour l’enregistrement des armes . Mais chaque détenteur aura son espace personnel.

Tout numérique

Dans une précédente Gazette, nous avions expliqué qu’il allait y avoir deux éléments essentiels au moment du passage au numérique :

- Le Référentiel Géneral des Armes (RGA) : sorte de catalogue de 40 000 fiches numériques dans lequel les armes existantes seront enregistrées selon leurs versions, calibres et autres caractéristiques techniques. Ainsi, chaque fiche arme proposera un régime de classement administratif.
Mais cela pose un problème pour les armes à verrou autour de l’année 1900 pour lesquelles le classement fait par l’administration reste confus. Et les propositions que nous avons adressées sur ce point au ministère de l’Intérieur, voici deux ans, n’ont même pas reçu un début de réponse.

- Le Système d’Information des Armes (SIA) : qui permettra de suivre individuellement les armes en temps réel, ce qui n’est pas le cas actuellement, le suivi s’effectuant à posteriori. Ce sera l’outil central du contrôle des armes légalement détenues en France et une énorme simplification de traitement par les préfectures.

Les nouveautés du SIA

L’ancien fichier AGRIPPA répertoriait uniquement les possesseurs d’armes alors que le rôle du SIA est plus vaste : au lieu de s’en tenir uniquement au détenteur, le système s’intéresse au fait de savoir en permanence chez qui sont les armes.
Au moment de son importation ou fabrication, l’arme sera enregistrée dans le SIA comme le sont les véhicules avec leur plaque d’immatriculation.

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C’est en 2021 que les détenteurs auront accès à leur ratelier virtuel. Cliquez pour agrandir.

En remplacement du « vieux » registre papier, chaque opérateur aura son « espace  » dans le SIA. La consultation du registre numérique donnera le détail du stock du professionnel.
Lorsque l’arme sera vendue à un autre professionnel, elle migrera d’un espace à un autre.
Et quand ce sera un particulier qui achètera l’arme, le professionnel consultera le compte du particulier. Si celui-ci a l’aptitude légale à l’acquérir, il transfèrera l’arme directement. Ce sera ainsi pour les armes de catégories C, B et A. Si le particulier est inscrit au FINIADA, cela apparaitra clairement, et le nombre d’armes détenues également.
Les futurs changements règlementaires prévoient notamment que l’autorisation ne sera plus donnée pour une arme, mais globalement pour 12 armes de catégories B pour 5 ans. Ainsi, tant que le quota de 12 ne sera pas épuisé, le tireur pourra continuer à acquérir sans autre formalité que l’inscription numérique. Il pourra même acheter les 12 armes le même jour.
Il en sera de même pour les armes à un coup et percussion annulaire qui sont hors quota. Et les armes de catégorie C s’enregistreront tout aussi facilement.
Comme l’intéressé pourra aller lui-même sur son espace, il pourra faire la chasse aux erreurs qui viendraient de l’ancien fichier AGRIPPA.
Chaque mouvement sera enregistré, c’est le but du SIA. Ainsi, si l’arme est prêtée pour un essai fait par un journaliste, l’arme est sortie au nom de l’emprunteur et réintégrée dans le fichier, lorsqu’elle est rendue.
L’acheteur particulier qui achète sa première arme, verra son compte créé par l’armurier.
L’enregistrement étant instantané, il ne sera pas possible de tricher sur les quotas et acquérir deux armes le même jour chez deux armuriers différents.
Le détenteur pourra même générer en ligne sa carte européenne d’arme à feu.

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Chaque détenteur aura son compte personnel et individuel, sur lequel il retrouvera toutes les armes à son nom.

Bref de quoi satisfaire professionnels et particuliers qui recherchent la simplification de leur vie avec la vitesse du numérique sécurisé, tout cela en quelques clics !

Inconvénients et vœux

Même la plus belle médaille a son revers. Tout le monde sait que la déclaration d’impôt par Internet est impossible pour les seniors qui ne sont pas rompus à l’informatique moderne. Il en sera de même pour les vieux armuriers qui n’ont pas pris le tournant numérique et qui en sont restés à la gestion papier, ils seront empêchés de continuer.
Le ministère a promis un logiciel ludique avec vidéo de présentation, tutoriels etc. Il est en effet important que cela soit facile et ouvert à tous. Il ne faut pas retomber dans les difficultés d’usage du logiciel Soprano de la douane pour les échanges internationaux. Les particuliers s’y perdent en raison d’un accusé de réception imparfaitement renseigné, du manque de réactivité du webmestre et d’un processus simple et bien expliqué.

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Vidéo du SCA. Le ministère avait promis des tutoriels, et cette première vidéo est excellente et très pédagogique.

C’est pour quand ?

Début janvier 2020, le RGA sera accessible pour tous les professionnels. Mais ce n’est que début juillet qu’ils pourront créer leur compte sur le SIA et commencer à̀ basculer leur registre papier dans le registre numérique. L’accès au FINIADA s’effectuera à partir de ce compte.
Le grand saut est prévu pour début 2021 où le registre spécial ne sera plus toléré au profit du tout numérique. C’est à partir de ce moment que les préfectures feront exclusivement sur ce portail l’instruction des dossiers des détenteurs et que toutes les démarches des demandeurs s’effectueront en ligne.
Les armuriers pourront envoyer leur fichier en Excel.CSV pour l’ouverture de leur livre de police numérique.

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Bien que ce sujet soit très sérieux, nous avons choisi de rire des papys et de leurs difficultés, sachant que cela nous arrivera à tous, un jour...

C’est l’Europe qui demande

C’est la dernière directive qui oblige les États à faire de la traçabilité des armes la priorité. Il doit y avoir un échange d’informations entre les professionnels (armuriers et courtiers) et l’administration « pour le bon fonctionnement des systèmes de fichiers de données... ...A cette fin, les autorités nationales compétentes devraient mettre au point un mode de connexion électronique accessible aux armuriers et aux courtiers, qui puisse inclure la transmission des informations par courrier électronique ou l’inscription directe sur une base de données ou sur un autre registre. [1] »
Entre autres, le SIA sera alimenté par les préfectures pour les autorisations et par les armuriers pour l’enregistrement des armes

Voir aussi :
- Communiqué de presse du Ministère de l’Intérieur : SCA.
- La sécurité des fichiers.

Les délais pour la mise en oeuvre du SIA.

Cet dates ont été fixées par décret.

- 1er octobre 2020 : Le livre de police dématérialisé se substitue aux autres registres ou PV de vente aux enchères. Mais les armuriers auront encore jusqu’au 31 décembre pour transférer le contenu de leur registre papier.

- 1er décembre 2020 : Les demande d’autorisation des commissaires-priseurs, que celles des ventes d’armes des catégorie A1 & B ainsi que les demande d’intermédiations pour les catégories A1, B, C et D seront faites de façon dématérialisée,


[1Directive UE 2017/853 considérant n° 10