Main basse sur le Musée royal de l’Armée de Bruxelles !

jeudi 18 avril 2019

A l’UFA, nous sommes toujours là pour dénoncer les injustices et les atteintes au patrimoine. Et nous suivons depuis longtemps les magouilles qui se déroulent au sein du Musée Royal de l’Armée Belge (MRA). D’un statut de musée gratuit, il est intégré au War Héritage Institut (WHI) depuis mai 2017.

Pour éviter un déménagement qui porterait un coup au patrimoine militaire belge, il faudrait que la région bruxelloise classe les salles historiques et techniques. Mais le temps est compté puisque les élections régionales du 21 mai prochain et les européennes le week-end suivant risquent de laisser la donne.
Laissons la parole aux irréductibles défenseur du patrimoine militaire belge.

Le Marteau

La crainte que nous avions de voir les collections du MRA dispersées se concrétise aujourd’hui plus que jamais :

  • la direction du WHI vient de créer un nouveau site extérieur associé à Zeebrugge appelé "Seafront", dans le même esprit que le site "Gun-fire" à Braschaat,
  • du côté de Leopoldsburg, le projet de créer un grand musée militaire flamand est entré dans sa phase préparatoire - une liste de plusieurs centaines d’objets à sélectionner circule parmi des membres néerlandophones du WHI priés de ne rien divulguer,
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    Les avions devraient être déménagés
  • la rénovation du grand Hall de l’air et de l’espace devra commencer d’ici 2020 avec pour conséquence probable le déménagement de certains appareils vers deux sites extérieurs : Beauvechain pour la Wallonie, et Coxyde pour la Flandre - la direction du WHI a clairement annoncé son intention de supprimer à terme tous les appareils civils et ce y compris la caravelle Sabena, fleuron du Hall de l’air et de l’espace.

L’enclume

Si les musées fédéraux qui font partie du service public n’offrent pas aux visiteurs la gratuité de l’entrée au moins un jour par semaine, cela voudra dire que nos politiques auront fait le choix de privilégier les classes sociales plus aisées au détriment de l’ensemble de la population.

Ce que le MRA vit aujourd’hui est une prise en mains progressive de l’institution par le libéralisme politique pur et dur. La création par le gouvernement d’un parastatal [1] de type B dénommé "War Heritage Institute" qui a avalé le MRA (un établissement scientifique public fédéral à gestion séparée depuis 2002) est l’évidence même que nos politiques veulent mettre en place une structure qui leur permettra de privatiser à terme l’institution (le fameux "PPP" : Partenariat Public Privé).

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L’entrée payante depuis 2016, a fait baisser la fréquentation du musée. Voir article de la libre.be.

Le directeur général "ai" Michel Jaupart [2], avec le général Oger Pochet (chargé de mission), sont les chevilles ouvrières de ce processus :
- le général Pochet a été véritablement le "liquidateur" du MRA en tant que dernier dir. ai de cette vénérable institution jusqu’au 1er mai 2017 (date officielle de la création du WHI) - il a été chargé dans un premier temps de faire table rase et d’obliger le secrétariat et tout le personnel administratif du MRA (près de 30 personnes) à déménager vers des locaux prévus provisoirement pour accueillir le WHI dans l’ERM (Ecole Royale Militaire) avec un coût annuel (loyer+frais) de fonctionnement de 100.000 euros/an !
- le dir. ai M. Jaupart n’a eu cesse de répéter qu’il avait de grands projets pour installer le WHI dans l’ancien commissariat de police de la Place Jamblinne de Meux, mais il a bien fallu qu’il se rende à l’évidence qu’il n’aurait pas l’argent pour ce faire et qu’il devrait déménager le WHI dans les locaux du MRA (ce qui aurait du être fait dès le départ).

Cette plaisanterie a coûté "deux ans de loyer" soit 200.000 euros pour rien !

Avec à la clé un ras-le-bol total au sein de l’institution (le personnel est dégoûté par ce jeu de chaises musicales contre-productif et humiliant). Outre les départs à la retraite qui ne sont pas remplacés, de plus en plus de membres du personnel préfèrent quitter l’institution en espérant que les choses s’arrangent entre temps...

Et voici que le Pdt de l’asbl "Amis du Musée de l’Air et de l’Espace" vient de démissionner lui aussi, dégoûté d’avoir été manipulé par la direction du WHI qui cherche également à éliminer les anciennes asbl.

Au sein même du parastatal, le torchon brûle entre le dir. gal ai et le dir. adjoint Francky Bostyn. Ce même M. Jaupart s’est en effet mis le Pdt du CA, Koen Palinckx (N-VA) à dos pour lui avoir caché le résultat d’une enquête interne sur le "bien-être" du personnel. La situation est on ne peut plus grave. Il y a véritablement péril en la demeure.

Faut-il en déduire que le dir. ai M. Jaupart veut liquider le musée et tout ce qu’il représente ? Il a essayé par tous les moyens d’empêcher le classement des salles historique et technique (voir la pétition en ligne) : cela est de notoriété publique.

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Animation gratuite pour les enfants

Mais ce qui est moins connu, c’est la pression mise sur le personnel du MRA et les scientifiques en particulier qu’il semble ne pas apprécier. Souhaite-t-il régler ’ses’ comptes avec l’institution car il n’a pas réussi à y entrer par la grande porte, ayant participé en 2007 à une "évaluation" en vue du recrutement d’un dir. général où il a été écarté ? C’est en effet Dominique Hanson qui avait été choisi comme dernier dir. gal à part entière du MRA.

Aujourd’hui, le dir. ai M. Jaupart sait que le temps lui est compté car les élections approchent à grands pas et il pourrait ne plus bénéficier de la protection du premier ministre Charles Michel et de son collaborateur Michel Peters (conseiller défense).

En ce qui nous concerne, il est évident que le le dir. ai M. Jaupart agit dans le but de préparer la place à la privatisation de l’institution souhaitée en coulisses par Benoît Remiche.

Nous dénonçons

Nous dénonçons l’arrêt« politique » du conseil d’Etat visant à protéger le gouvernement en déclarant irrecevable le recours constitutionnel afin d’éviter d’aller au fond et de créer un vide juridique puisque que l’AR instituant le WHI était anticonstitutionnel (n’ayant pas l’accord préalable des régions au moment du vote).

Personne ne pouvant nous reprocher l’action citoyenne actée dans l’arrêt de la cour constitutionnelle, nous dénonçons :
- la spoliation du patrimoine national,
- la gabegie financière de la direction du WHI,
- les méthodes internes vis-à-vis du personnel de la part du WHI,
- les irrégularités des recours contre le classement des salles historique et technique.

Cet article écrit par Jacques Toussaint nous vient de de l’asbl Art&Héritante.

Repères :
- La pétition en ligne a déjà rapporté 30000 signatures.
- Voir notre précédent article.
- La libre Belgique dénonce parfaitement le problème. Mais finalement le gouvernement Belge à fait marche arrière et étend la protection patrimoniale du Musée de l’Armée.
- Protestation d’un député au Parlement Wallonie-Bruxelles

[1Le parastatal (appellation officielle en Belgique) permet le partenariat public/privé, ce qui est une bonne chose, mais est aussi la voie vers la privatisation progressive de l’institution avec toutes les dérives que cela comporte. En effet, si le MRA avait acquis en 2002 le statut d’établissement scientifique fédéral à gestion séparée (ce qui était déjà très bien), aujourd’hui on a une situation qui n’est plus garantie par le gouvernement (sauf pour les fonctionnaires statutaires). Dans l’avenir, toute une série d’activités seront confiées au privé (billetterie, boutique, cafétéria etc.). Seuls les bâtiments et les collections resteront la propriété de l’Etat. Ce qu’il faut craindre, c’est la dispersion des pièces vers les régions flamandes et wallonnes et le démantèlement du noyau historique de ce musée qui avait été cré en 1910 à l’instar du musée de l’Armée de Paris (Invalides) et installé en 1923 sur le site du Cinquantenaire par la volonté du roi Albert 1er qui voulait honorer le sacrifice de la Belgique pendant la première guerre mondiale.

[2"ai" signifie en latin "ad interim" càd qu’il est directeur en attendant que le prochain gouvernement après les élections du 26 mai 2019 procède à un recrutement en bonne et due forme d’un directeur qui sera nommé pour un mandat de 6 ans renouvelable une fois