Questionnement : quelles armes seraient classées en catégorie A ?
vendredi 22 décembre 2017, par ,
Le Sénat vient de voter une modification de la loi sur les armes et l’Assemblée Nationale s’ apprête à le faire au mois de janvier [1]. Un certain nombre d’armes classées en catégorie B seraient classées en catégorie A. Mais, la nouvelle Directive Directive (UE) 2017/853 a prévu que les Etats membres “ peuvent autoriser les tireurs sportifs à acquérir et à détenir des armes à feu semi- automatiques relevant du point 6 ou 7 de la catégorie A “.
Nous nous sommes penchés sur les différents types d’armes qui pourraient être touchées par cette mesure. Et en fin de compte, nous restons hésitants sur les réponses à donner pour certaines armes.
La définition donnée par le processus législatif.
Le rapporteur de la loi au Sénat, tout en reconnaissant que le classement n’était pas de l’ordre législatif (de la loi) mais plutôt règlementaire (décret ou arrêté), a indiqué que les armes concernées seraient :
• les armes semi-automatiques issues de la transformation d’armes automatiques et des armes à percussion centrale et à chargeur fixe pouvant contenir plus de 10 cartouches (armes longues) ou 20 cartouches (armes courtes),
• les armes longues dont la longueur peut être réduite à moins de 60 cm après que la crosse ait été repliée ou enlevée sans l’aide d’outils.
Examinons les !
• Les armes à feu conçues à des fins militaires, comme l’AK47 et le M16, et qui sont équipées d’un sélecteur de tir, pour lesquelles il est possible d’ajuster manuellement les modes de tir entre la position automatique et la position semi- automatique, devraient être prochainement classées en catégorie A paragraphe 6.
Il est prévu que les tireurs sportifs, qui détenaient auparavant ces armes au titre d’une autorisation de catégorie B pourront être autorisés par dérogation au titre d’une autorisation de catégorie A6.
- Le Fusil-Mitrailleur BREN, conçu d’origine pour le tir sélectif et transformé par la société ESIStoire par ne plus pouvoir tirer par rafales avant d’être vendu aux tireurs sportifs. Cette arme d’une précision remarquable permet réellement de pratiquer avec succès le tir à la cible !
Dans sa proposition initiale, la Commission Parlementaire souhaitait que les "armes à feu automatiques transformées en armes à feu semi-automatiques" restent dans la catégorie B dans le cas où la conversion serait irréversible, et soient placées dans la catégorie A dans le cas contraire. "Les parlementaires européens avaient proposé que la Commission élabore de nouvelles normes techniques pour définir quelles conversions sont irréversibles. Cependant, la Commission n’était pas disposée à accepter cette responsabilité" a déclaré Mme Ford, rapporteur à la IMCO.
Nous citons : "Afin de conclure un accord, les négociateurs représentant la majorité du Parlement ont accepté que les armes à feu automatiques transformées en armes à feu semi-automatiques soient de catégorie A. Ils ont cependant ajouté de nouvelles procédures d’autorisation pour que, à l’appréciation de l’État membre, les réservistes, les tireurs sportifs et ceux disposant de licences spéciales puissent être autorisés à détenir ce type d’armes. Par ailleurs, une ‘clause d’antériorité’ a été ajoutée de sorte que les propriétaires existants puissent continuer à posséder, transférer, hériter ou vendre ces armes à d’autres personnes en possession de l’autorisation nécessaire - à nouveau, à l’appréciation de l’État membre" a précisé le rapporteur.
Seulement, la notion de "armes à feu automatiques transformées en armes à feu semi-automatiques" va apporter beaucoup de problèmes aux législateurs des pays membres car elle ne correspond pas à une réalité unique dans le monde réel des armes réglementaires utilisées en tir sportif. On peut en effet distinguer plusieurs cas dont la prise en compte est loin d’être évidente.
• Prenons le cas du FN FAL. C’est une arme conçue pour disposer de la possibilité de tir en "Full-Auto". Mais certaines versions du FAL n’ont jamais été équipées du mode "Full-Auto", comme le L1A1 produit par l’arsenal d’état australien de Lithgow. Une version Full-Auto existe (le FALO), référencée L1A2, avec un dimensionnement adapté au tir en rafale de la puissante cartouche OTAN. Mais ce n’est pas le FAL L1A1 ! Alors : est-ce que tous les détenteurs de FAL - canadiens, anglais, autrichiens, australiens seront logés à la même enseigne et verront leur arme classée en A6 ? Il est évident que le détenteur d’un FAL australien introduira un recours administratif exigeant le maintient en catégorie B de ce modèle spécifique du FAL.
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• Le "M16" est clairement cité dans le texte définitif adopté par le Parlement en mars 2017. Hélas, le "M16" qui n’est qu’une seule des multiples versions de l’arme connue génériquement sous le nom de AR15 (d’après le nom qui lui a été donné par son concepteur Armalite). Il y a bien évidement des armes de type AR15 destinées au marché militaire et qui ont été déclassées pour une vente civile après inactivation de la fonction "tir par rafales" (Full Auto). Cette inactivation a soit été réalisée par le simple retrait de pièces du mécanisme de détente, soit par la transformation par usinage des éléments permettant le tir en rafale.
Dans le premier cas, il suffit de remplacer les pièces supprimées pour rendre à l’arme sa fonction "tir en rafale", dans le second cas, la transformation est profonde et difficilement réversible.
- Un fusil d’assaut FN FAL avec sélecteur à trois positions permettant le tir par rafales (Full Auto)
Afin de satisfaire aux exigences de la réglementation américaine, de nombreuses versions de fusils semi-automatiques de type AR15 ont été fabriquées spécifiquement pour tir sportif. Le boîtier et la carcasse de ces armes dites "Sporter", ont été usinés de façon à ne pas permettre de les faire tirer en rafale en y montant des pièces détachées provenant d’armes militaires. Pour ces dernières, même si le type générique permettait le tir en rafale, on ne peut même plus parler "d’irréversibilité de la transformation en semi-automatique" car ces armes n’ont jamais eu de possibilité de tir "full-auto".
• Il y a aussi des armes à l’origine uniquement semi-automatiques, qui ont reçu dans une version tardive une possibilité de tir par rafales. A l’usage, ce type de transformation ne s’est pas révélé intéressant et ces modèles ont été abandonnés car le tir en rafale n’était pas compatible avec ces armes. On peut citer les évolutions du Garand que sont le M14 et le BM 59 italien. Et aussi le fusil (S)AFN 49 - précurseur du FAL et l’AVT 40, version à tir sélectif du fusil semi-automatique soviétique Tokarev SVT 40.
- Le FAL australien fabriqué d’origine pour ne permettre que le tir semi-automatique : restera-t-il en catégorie B ou sera-t-il classé par excès en catégorie A6 ?
- SAFN 49 : L’armée belge a un moment essayé de doter ce fusil semi-automatique d’une fonction "tir par rafales". Cette modification a abouti au fusil AFN 49 qui s’est révélé tellement inefficace en tir automatique que le sélecteur de tir et les pièces permettant le tir par rafales ont été supprimés, afin de ramener l’arme à sa configuration d’origine.
Notons surtout que de nombreuses armées, comme les forces armées britanniques ou néerlandaises, ont été tellement convaincues de l’inutilité et de l’inefficacité de la fonction tir par rafales de leurs FAL - qui préoccupe aujourd’hui tellement nos parlementaires - qu’elles l’ont purement et simplement supprimée. La fonction tir en rafale a également été supprimée sur beaucoup de M14 américains, pour les mêmes raisons. Ces armes sont aujourd’hui assez rares sur le marché des armes de tir. Celles qui sont arrivées sur le marché du tir sportif ont préalablement été privées de leur possibilité de tir en rafale après le retrait de quelques pièces ou la soudure du sélecteur de tir.
Leur "dangerosité" n’est évidement pas aussi "avérée" que les fusils d’assaut "Kalachnikov" qui sont systématiquement retrouvés dans les règlements de compte du "milieu" et de quelques exactions terroristes ;
Ces derniers préférant maintenant la discrétion d’un véhicule de location transformé en engin de mort entre leurs mains.
Se passer la patate chaude !
On peut craindre que le législateur aura bien du mal à définir ce que la Commission Européenne n’a surtout pas voulu assumer - en bon "Ponce Pilate" : "Comment déterminer si une arme semi-auto peut ou ne peut pas être (re)transformée pour le tir en rafale". Là est la véritable question.
Le maillon faible est l’homme, pas l’arme. Notre legislation nationale et déjà très exigeante quant au filtrage des candidats à la détention d’armes. N’en rajoutons pas là où ce n’est pas nécessaire.