Le SIA vu par la grande presse
Un effet pervers de l’annonce du SIA
mardi 11 janvier 2022, par
Le SCAE ne l’avait pas prévu, mais la présentation aux médias du SIA est en train d’agiter les rédactions de nombreux médias qui y trouvent une opportunité de parler d’autre chose que de la pandémie de Covid 19.
La Provence a été la première à ouvrir le feu début janvier. Dans un article intitulé « Vos armes devront être déclarées en ligne », Florent Bonnefoi décrit longuement le nouveau processus mis en place par le Service Central des Armes et des Explosifs et pose les bonnes questions sur les difficultés que risquent de rencontrer les tireurs et les chasseurs frappés d’inculture numérique. Malheureusement, il termine son article de façon aussi spécieuse qu’alarmiste en laissant entendre que, je cite : « la moitié des crimes et délits impliquant une arme à feu concernent du matériel déclaré ».
Si certains amateurs d’armes sont atteints d’illectronisme, il semblerait bien que de nombreux journalistes soient touchés eux par une inculture du monde des armes mâtinée d’hoplophobie [1].
La preuve en est qu’après la Provence, c’est au tour du Figaro d’entrer dans la danse et de sortir l’artillerie lourde. Là, on ne tourne plus autour du pot, dans l’édition du 09 janvier dernier, le journal titre : « Face à l’insécurité, de plus en plus de Français s’arment ».
Cette fois ci, c’est Stéphane Kovacs qui s’y colle et il n’y va pas avec le dos de la cuillère puisqu’on peut lire sous sa plume affûtée : « le système d’information sur les armes (SIA), un nouvel outil numérique censé faciliter les démarches des usagers et renforcer la traçabilité des arsenaux ». Des arsenaux, rien que ça ! Alors pour Monsieur Kovacs un peu de sémantique. Si l’on en croit le Larousse, un rien plus précis, sinon sérieux, que le Figaro, un arsenal est « l’établissement industriel d’un port, où les bâtiments de guerre sont construits, réparés, ravitaillés et armés.
Autrefois, établissement construisant des matériels de l’armée de terre ».
On est loin du calibre 12 de papy ou du Glock du cousin qui fait du tir sportif dans un stand agréé par la FFTir.
Figaro-ci, Figaro-là
Quand la presse écrite s’emmêle, il faut bien que la radio s’en mêle. Aujourd’hui donc, la 11 janvier 2022, c’était au tour des « Grandes Gueules » animées par Alain Marschall et Olivier Truchot de monter au créneau avec en guest star Frédéric Hermel pour son billet d’humeur : "C’est ça la France !"
Ici rien de nouveau si ce n’est un triste copié/collé des arguments du Figaro, sur cette France aux 12 millions d’armes aux mains d’une population qui ne cesse de s’armer.
On y apprend que nos compatriotes, de peur des armes détenues illégalement par les malfrats, s’équipent de plus en plus en acquérant des armes déclarées ! Et que l’ARPAC qui milite pour le rétablissement du port d’arme citoyen « compte déjà 45 000 membres ».
On croit rêver, voilà donc des professionnels de l’information qui confondent en toute tranquillité les membres actifs d’une association et ses sympathisants sur internet.
Le reste est de la même veine puisque malgré la modération affichée par les présentateurs du talk-show, Monsieur Hermel persiste et signe, à grand renfort d’exemples empruntés aux faits divers qui agitent l’Amérique… Il est heureusement repris à plusieurs reprises par Étienne Liebig qui cite la forte baisse des homicides par armes à feu en France et l’exemple du Canada où la culture des armes est assez proche de celle des USA, sans pour autant que des tueries de masse ne viennent en entacher les colonnes des faits divers.
Les chiens aboient, la caravane passe
L’émission se termine, finalement de façon assez équilibrée avec le témoignage d’un tireur invité à s’exprimer sur le sujet. Un témoignage qui pose le débat et apporte un éclairage clair sur la pratique du tir sportif.
A ce propos, qui est l’auteur du billet d’humeur qui a porté le fer contre les amateurs d’armes ? Un spécialiste des armes à feu ? Un expert en armement portatif ? Non, un journaliste sportif, abonné semble-t-il au Figaro.
D’un média à l’autre
Soyons juste, tous les médias ne traitent pas les amateurs d’armes avec autant de désinvolture. J’en veux pour preuve l’émission « Face à l’info » animée par Christine Kelly sur CNews le 10 janvier dernier. Le sujet est le même, mais Dimitri Pavlenko qui traite le dossier s’est visiblement renseigné et possède bien son sujet. Du coup son analyse est claire, sans à priori, et présentée avec une réelle objectivité.
L’honnête citoyen, dit-il, fait souvent les frais d’une politique forte avec les faibles et faible avec les forts… Il ajoute qu’il n’y a pas de ruée vers les armes en France, et pour cause, le nombre de ventes des armes neuves a baissé de façon très importante.
Il s’en vendait encore 300 000 par an jusqu’en 1995. Depuis, il ne s’en vend plus que 80 000 par an, soit une baisse de l’ordre de 75 %.
Enfin, il stigmatise l’amalgame récurrent entre la situation des armes dans notre pays et ce qui se passe aux Etats-Unis.
On aimerait voir plus souvent le sujet traité avec autant de mesure et d’objectivité, comme dans cette autre émission de France 2.
Rel. L- 12/01/22