Article paru dans la Gazette des armes n° 523 d’octobre 2019

Comment classer une réplique améliorée ?

samedi 19 octobre 2019, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Le Code de la Sécurité intérieure définit ainsi la reproduction d’arme ancienne comme étant une « arme à feu reproduisant à l’identique une arme ayant existé dans sa forme et dans son fonctionnement » [1]. Et il classe les reproductions en catégorie D §f) comme celles « dont le modèle est antérieur au 1er janvier 1900 ne pouvant tirer que des munitions sans étui métallique, sauf celles dont la technique de fabrication améliore la précision et la durabilité de l’arme. »

Ce classement découle de la directive [2] qui, tout en excluant les armes anciennes de son champ d’application, a choisi d’inclure les répliques qui sont « construites en recourant aux techniques modernes susceptibles d’améliorer leur durabilité et leur précision ». Comprenez que ce sont les répliques qui ne sont pas véritablement des répliques, mais des inventions complètes ou des répliques qui sont différentes des armes d’origine. Soumettre les « répliques améliorées » à la directive, revient à les classer en catégorie C ou B selon que ce soit des armes d’épaule ou de poing.

Ressembler n’est pas reproduire !

Déjà dans les années 2000, le Ruger Old army avait été exclu du classement dans la catégorie des répliques d’armes anciennes, du fait que qu’il ne s’agissait pas d’une réplique, mais simplement d’une arme à poudre noire qui ressemble vaguement à un Remington 1858, mais qui est une invention récente.

Avec l’application de la nouvelle directive, nous avions tous bien compris que les répliques inventées qui ne reproduisent rien d’existant, ne seraient pas classées dans la catégorie D §f). Par exemple, il s’agit :
-  Des créations modernes à poudre noire comme le Lindsay de Melcher industrie Waffe qui n’a jamais existé à l’époque.
-  Les rétro-conversions des armes conçues à l’origine pour la percussion centrale et transformées pour être chargées par l’avant (répliques type Colt 1873 en version « cap & ball »…)
-  Des armes modernes conçues pour le tir à poudre noire (CVA Wolf, Thompson Center Impact…).

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Une reproduction en inox, est bien une reproduction au sens de la règlementation, elle n’apporte pas d’innovation qui la rendrait plus précise ou plus solide.

Les répliques en inox ?

Nous nous étions posé la question des reproductions en inox. Soyons clairs, bien que très fidèles, les répliques actuelles, sont fabriquées avec des machines à commande numérique et les aciers d’aujourd’hui, le cas échéant inoxydables. Mais il est évident que les filetages d’époque ont été remplacés par des filetages ISO et que l’ensemble comporte de légères différences de cotes pour faciliter l’assemblage mécanisé ou empêcher de faire passer des pièces modernes pour des pièces d’époque. Mais rien de tout cela ne change quoi que ce soit au fonctionnement, au mode de chargement, aux performances, à la solidité ou à la précision, donc, la « dangerosité » de l’arme n’est pas augmentée.
Bien au contraire, les répliques modernes courantes, sont plutôt moins précises que les armes d’époque. Les répliques faites en inox aujourd’hui ne font que reproduire ce qui se faisait à l’époque avec des traitements de type nickelage qu’il serait trop couteux et pas assez écologique de reproduire aujourd’hui. Ces répliques faites en inox sont donc incontestablement classées en D §f).

Les répliques avec organe de visée

Nous avions hésité à nous prononcer sur les répliques sur lesquelles ont été installés des instruments de visée qui n’existaient pas à l’époque. Nous avons vainement cherché des armes d’époque comportant des hausses réglables et n’en avons trouvé qu’à partir de 1869, au moment où le chargement par l’arrière avec des munitions à étui métallique s’est généralisé.

Il y a notamment le S&W n°3 New Model Target, mais aucun revolver plus ancien ne comporte à notre connaissance d’organe de visée réglable. Récemment, le SCA a communiqué vers des armuriers pour leur rappeler que les répliques ne doivent pas avoir « d’amélioration de la précision ». Il faut dire que l’on a vu installé sur un « 1858 X-Trem Target », une visée point rouge. Il est évident que l’on sortait du contexte historique de l’arme.

Continuité du classement

Dans le fond, la philosophie du classement n’a pas changé depuis 20 ans, une reproduction d’arme ancienne doit être globalement fidèle et non pas comporter de nouveauté, sinon ce n’est plus une reproduction.
Les collectionneurs se réjouissent d’avoir pu conserver leurs répliques en catégorie D§f) alors qu’ils avaient été inquiets avec la dernière directive

Voir aussi un article précédent : Le classement des reproductions d’armes

Rel. L- 17/06/21


[2Point 27 de la directive n°(UE) 2017/853, (Lorsque les États membres disposent de législations nationales régissant les armes anciennes, ces armes ne sont pas soumises à la directive 91/477/CEE. Toutefois, les reproductions d’armes à feu anciennes n’ont pas la même importance ou le même intérêt historique et peuvent être construites en recourant aux techniques modernes susceptibles d’améliorer leur durabilité et leur précision. Par conséquent, ces reproductions devraient relever du champ d’application de la directive 91/477/CEE. La directive 91/477/CEE n’est pas applicable à d’autres articles, tels que les dispositifs airsoft, qui ne correspondent pas à la définition d’une arme à feu et ne sont donc pas réglementés par ladite directive.)