Transposition de la Directive européenne

Vente par correspondance et entre particuliers

samedi 30 septembre 2017, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Cet article découle d’une suite d’articles sur la transposition de la Directive. Il est intéressant de consulter la rubrique pour se faire une idée.

- Ce qui est annoncé dans le projet : lors d’une vente à distance par un armurier ou d’une vente entre particuliers, il y aurait interdiction d’une livraison directe au domicile de l’acheteur. Il faudrait qu’un armurier vérifie l’identité de l’acheteur avant la transaction ou au plus tard au moment de la livraison. Pratiquement, l’expédition devrait s’effectuer chez un armurier qui, après vérification des titres sportifs et papiers d’identité, et lorsque c’est le cas de l’autorisation, avant de remettre son arme à l’acheteur. C’est ce même armurier qui se chargerait des déclarations.
Le projet prend soin d’ajouter : « La transaction est réputée parfaite à compter de la remise effective à l’acquéreur. »

- Mauvaise rédaction du projet :
Tel que le projet est rédigé, il y a un « ou » en trop. Cette rédaction signifierait que les armuriers également se trouveraient dans la situation où il leur serait impossible de livrer directement à leur acheteur. Inutile de dire que la profession est en train de monter efficacement aux créneaux pour corriger cette anomalie rédactionnelle.

- Décryptage :
Cette disposition était déjà dans la Directive, mais, la loi permettait jusqu’alors une dérogation pour livrer directement chez l’acheteur. La nouvelle loi projette simplement de supprimer cette possibilité de dérogation du pouvoir règlementaire.
Cet article du Code de la Sécurité Intérieure change la notion du Code Civil qui fixe au moment de l’accord la conclusion du contrat de vente.

- En pratique :
Voilà une disposition impossible à mettre en application.
Si le texte devait être appliqué de cette façon, il serait impossible de livrer particuliers, administrations, clubs de tir, personnel de sécurité dans les départements où il n’existe pas d’armuriers.
La mesure ne touchant que les particuliers est déjà très impopulaire. Mais applicable à l’ensemble des transactions à distance elle est totalement irréaliste.
Ainsi un particulier qui commanderait dans l’UE en faisant une demande de transfert d’arme à feu, ou à l’étranger en faisant une demande d’AIMG, recevrait son colis chez lui avec simplement les formalités de douane pour les pays tiers à l’UE. Par contre, s’il commande en métropole chez un armurier, il serait contrait faire des centaines de kilomètres pour aller le chercher, à condition que l’armurier existe, ce qui n’est pas le cas dans bien des départements ou territoires d’OM. Impensable !
Cela favoriserait les achats chez des professionnels ou particuliers hors métropole. Pas bon pour la balance commerciale !
Inutile de dire que la profession se mobilise pour faire changer cette disposition.
Et puis cela va poser des problèmes sur le plan du droit de la concurrence : on interdit aux français ce qui est permis aux étrangers…

- A noter pour les particuliers :
La nouvelle rédaction de l’article L313-5 [1] leur interdit la remise directe entre eux, que ce soit par correspondance ou face à face. Ce que n’avait pas interdit la Directive. Le projet de décret en « surajoute“ à la Directive.


[1Modification de l’article L313-5 du CSI : Les matériels, armes ou leurs éléments essentiels des catégories A, B, C ainsi que des armes de catégorie D énumérées par décret en Conseil d’Etat, qui, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l’Article L. 313-4, sont acquis par correspondance, à distance ou directement entre particuliers ne peuvent être livrés que dans les locaux mentionnés aux premier et troisième alinéas de l’Article L. 313-3. Un décret en Conseil d’Etat énumère les armes de catégories B, C et D et leurs éléments essentiels ainsi que les munitions de toute catégorie qui, par dérogation au premier alinéa de l’Article L. 313-4, peuvent être directement livrés à l’acquéreur dans le cadre d’une vente par correspondance ou à distance.
Ce même décret fixe les conditions dans lesquelles sont réalisées ces expéditions.
« Sauf si la transaction a été faite dans le cadre des activités mentionnées à l’article L. 313-2, les matériels, armes ou leurs éléments essentiels des catégories A, B, C ainsi que des armes de catégorie D énumérées par décret en Conseil d’État, qui, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l’article L. 313-4, sont acquis par correspondance, à distance ou directement entre particuliers ne peuvent être livrés que dans les locaux mentionnés aux premier et troisième alinéas de l’article L. 313-3, aux fins de vérification de l’identité de l’acquéreur, des pièces mentionnées à l’article L. 312-4-1 ou, le cas échéant, de l’autorisation d’acquisition et de détention de l’acquéreur mentionnée à l’article L. 312-4.
La transaction est réputée parfaite à compter de la remise effective à l’acquéreur. »