Fait de société
Le trafic d’armes sur la toile est une boîte noire difficile à pénétrer
mercredi 30 septembre 2015
Dans un article diffusé à l’origine par l’AFP et repris par tous les médias à la virgule près, on annonce à grand renfort de tambours et trompettes que : Le trafic d’armes sur internet est une boîte noire difficile à pénétrer pour les autorités. Lire l’article.
Cet article se fonde sur des informations éventées et fragmentaires et nous trouvons dommage et dramatique qu’un journaliste se soit contenté de recopier des âneries que l’UFA a déjà dénoncé plusieurs fois.
Lire : Peut-on remettre en état une arme neutralisée ? Faire tirer une Kalachnikov neutralisée ? |
Dénonçons un peu de sensationnel : "on trouve sur tel site une AK yougoslave et un Beretta modèle 35 pour 248 € " ; cela donne un petit air factuel à l’information et tend à rendre crédible le reste de l’article. Or, quelle est l’information ? On trouve effectivement des armes neutralisées sur internet et certains malfrats spécialistes très bien équipés, disposant de contacts qui ne sont pas ceux de monsieur tout le monde, peuvent ensuite les remettre en état. Ce n’est donc pas le citoyen ou même le délinquant moyen qui y aura accès, mais seulement des gens qui ont déjà partie liée avec des réseaux de trafiquants structurés.
Comparons : pour une Kalach remise en état, combien arrivent directement en état de tir des Balkans ou du Maghreb ? S’intéresser aux ventes d’armes sur internet, c’est une façon de passer sous silence les frontières-passoires de l’espace Schengen !
Pour conclure nous supposons que le journaliste qui a commis cet article doit être fier de sa désinformation ! Ce n’est pas à l’honneur de la profession.
Pour ce qui est de l’article : une fois de plus, les journalistes mélangent un peu tout ! C’est tellement plus facile de faire une synthèse des différents papiers déjà publiés (même si ce sont des sottises) que de s’informer par soi-même !
Lire l’article de Paris Normandie qui dévoile le plan de lutte contre le trafic d’armes.
L’article de l’AFP en question : Au gré des règlements de compte, le trafic d’armes à feu fait l’objet de mesures de plus en plus sévères, mais les autorités peinent à pénétrer la "boîte noire" d’internet, où contacts et informations s’échangent en toute discrétion, noyés dans la masse. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve doit dévoiler vendredi un plan "global extrêmement offensif" contre le trafic d’armes, annoncé mi-septembre après une énième fusillade à Marseille. Il comprendra "un volet opérationnel, un volet de renseignement et un volet de coopération européenne", avait précisé Manuel Valls. Le Premier ministre a déjà annoncé que les enquêteurs pourront réaliser des "coups d’achat" (jouer le rôle d’un acheteur potentiel) comme cela se pratique pour les stupéfiants, et recourir plus facilement à la géolocalisation et aux perquisitions. Les peines d’emprisonnement seront également "durcies" de trois à cinq ans pour le trafic des armes à feu les plus dangereuses (catégories A et B). Les saisies d’armes vont croissant : 5.043 ont été saisies en 2014 par la police et la gendarmerie, selon la Section centrale armes, explosifs et matières sensibles (Scaems), et 828 par la douane. Mais le défi du législateur reste la gigantesque toile d’internet, qui concentre les failles du système : difficulté à collecter du renseignement, manque d’harmonisation des législations européennes, contrôle difficile des mouvements dans l’espace Schengen... "La détection en amont, notamment via internet, est une clé majeure pour réduire le trafic, mais c’est une des plus difficiles à réaliser", estime Jean-Charles Antoine, docteur en géopolitique spécialisé sur le trafic d’armes. "Internet a élargi les possibilités de contacts, avec une forme d’anonymat. Ça a été un accélérateur de diffusion de la connaissance, des informations, des échanges." Le site Silkroad a rendu célèbre le "darknet", réseau parallèle où quelques clics bien informés permettent d’accéder à des produits illicites, dont des armes. Mais l’internet classique est aussi un terrain utilisé par les trafiquants. D’internet aux mains de Coulibaly - Certains profitent des forums d’amateurs d’armes pour nouer des contacts malveillants (qui se poursuivent ensuite plus discrètement), noyés dans l’immense flot des discussions inoffensives. D’autres se fournissent sur des sites de vente d’armes neutralisées, c’est-à-dire rendues inopérantes et destinées aux collectionneurs ou au cinéma. Mercredi, on pouvait y trouver une kalachnikov de fabrication yougoslave à 380 euros, un pistolet Beretta M35 à 248 euros... Les armes neutralisées s’achètent et circulent légalement depuis qu’un arrêt de la cour de Cassation de décembre 1996 (arrêt Barbe-et-Butel) considère comme une marchandise normale une arme répondant aux normes de neutralisation françaises, les plus drastiques d’Europe. Mais elles sont parfois ensuite remilitarisées par "des spécialistes qui méritent de retenir tout particulièrement l’attention des services spécialisés", souligne une récente note stratégique de la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ). Le flou juridique sur le responsable de la neutralisation de ces armes (le vendeur ou l’acheteur) et les rarissimes contrôles facilitent leur détournement. "La différence des standards de neutralisation au sein des pays de l’Union Européenne offre des opportunités pour remilitariser rapidement et à moindre coût des armes faiblement neutralisées (armes de poing espagnoles, armes de panoplie belges)", souligne également la DCPJ, estimant que "l’association d’un bon technicien et d’un réseau de malfaiteurs actifs dans la revente peut entraîner une forte production d’armes de guerre". Certaines atterrissent dans des circuits dangereux. Des enquêteurs français ont ainsi découvert il y a quelques mois qu’une arme neutralisée achetée sur un site slovaque était arrivée, après divers intermédiaires, entre les mains d’Amédy Coulibaly, le jihadiste preneur d’otages de l’Hyper Cacher. "L’enjeu fondamental, c’est la détection dans un système préventif global. C’est ce qu’il faut développer", martèle Jean-Charles Antoine, qui prône la création d’une agence nationale sur les armes. A l’heure où l’on traque les téléchargements illégaux de films et de musique, enquêteurs et observateurs verraient également d’un bon oeil la mise en place d’outils informatiques permettant de repérer à la source des contacts et comportements suspects. |