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Article paru dans la GA N°480 de novembre 2015

Saisies et dommages collatéraux !

samedi 14 novembre 2015, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Ce mois-c,i nous abordons un problème qui touche un certain nombre d’amateurs qui ont toutes les difficultés à récupérer leur collection qui a été saisie par le Préfet ou les autorités de police. C’est le résultat de l’application de la nouvelle loi sur les armes. Lorsque la saisie définitive est prononcée, ces armes sont détruites.

Le Code de la Sécurité Intérieure précise : « Si le comportement ou l’état de santé de la personne détentrice d’armes et de munitions présente un danger grave pour elle-même ou pour autrui, le préfet peut lui ordonner de les remettre à l’autorité administrative. » Cette mesure est prise « sans formalité préalable, ni procédure contradictoire », à titre préventif et dans l’intérêt de la sécurité publique à l’encontre de ladite personne explique le ministère dans une note interne qui poursuit : « la décision préfectorale est provisoire et conservatoire. Elle n’a pas pour objet de sanctionner une infraction. » La note ajoute encore : « Le préfet doit fonder sa décision sur des faits précis et concordants signalés par la police ou la gendarmerie nationale. »
Le véritable problème est que le texte stipule qu’il s’applique « aux armes, quelle que soit leur catégorie. »
C’est-à-dire aux armes soumises à autorisation, déclaration/enregistrement ou de détention libre. Comme on peut le voir le débordement est facile, tant sur les motifs que les armes saisies. Et les nombreuses « bavures » sont mal vécues par les victimes.

Des motifs variés

Ces derniers mois nous avons été consultés par de nombreux détenteurs à qui de nombreuses armes, quand ce n’est pas l’intégralité de leur collection, avait été saisies.

Les faits qui ont déclenché les procédures sont à peu près toujours les mêmes :

- le désordre que les personnes elles-mêmes ont créé : disputes avec les voisins, violences conjugales, menaces diverses, résistance aux forces de l’ordre, etc. Dans cette situation, on entre exactement dans le cas prévu par la loi : « dangereux pour lui même ou pour autrui » et le Préfet a beau jeu de saisir les armes.
Mais il arrive que les désordres soient tirés par les cheveux. Un détenteur téléphone plusieurs fois à son ex-femme pour des questions de divorce, elle ne décroche pas et porte plainte pour harcèlement.

- la visite inopinée. Les pompiers peuvent venir porter secours et alors ils découvrent ce qui, pour un non connaisseur constitue un arsenal. Souvenez vous du Papy de Lyon.
Parfois la visite inopinée n’est pas innocente et des agents municipaux, gendarmes ou autres pénètrent chez le collectionneur sous divers prétextes. Et lorsqu’ils découvrent le « stock », cela devient une saisie incidente et tout est embarqué sans ménagement. Cette fois ce n’est plus le Préfet, mais une opération de police.

- l’enquête de police. Dans le cadre de la lutte contre le trafic d’armes, les carnets d’adresses et ordinateurs des délinquants sont épluchés. Et si par malheur un de ces « malfaisants trafiquants » a eu un contact avec vous, alors vous y avez droit ! Souvent avec un déploiement de policiers qui sont en nombre disproportionné avec la « dangerosité » des armes illégales qui pourraient être trouvées.
Mais il y a aussi ceux qui traitent par Internet et commandent des pièces détachées légales pour monter sur des armes détenues légalement (avec autorisation ou neutralisées). Les sites et diverses transactions numériques étant très surveillées, cela a occasionné de nombreux déboires à des innocents ou inconscients collectionneurs.

Saisies excessives

Nous avons de nombreux témoignages qui sont très poignants.
Plusieurs fois la saisie a été destructive pour le logement le rendant inhabitable ou le laissant dans un désordre indescriptible. Il arrive également que certaines pièces saisies disparaissent purement et simplement, car « ces messieurs » aussi sont souvent collectionneurs. Mais comment prouver après coup qu’une pièce a été subtilisée pendant la saisie, d’autant plus que beaucoup de victimes de perquisition préfèrent passer l’affaire sous silence estimant qu’une pièce délictueuse de moins sur l’inventaire des scellés allégera la peine !

Des armes de collection ont été saisies et classées par erreur en catégorie B. Ce sont des expertises de gendarmes ou d’experts de l’administration qui commettent ces erreurs. Et allez prouver que votre Bulldog est bien une arme de catégorie D2 lorsque vous n’avez pas de photo et qu’on vous refuse l’accès au greffe pour en faire une.
Dans une autre affaire, toute une collection d’explosifs didactiques ou inertes a été saisie suite à une visite inopinée. Bien sûr un corps de grenade est classé en catégorie A, mais dans ce cas, il s’agissait d’un véritable musée avec des pièces rarissimes.

Procédure stricte

Dans les deux cas qui suivent, le Préfet peut saisir toutes les armes, y compris les armes de collection.

- Saisie pour danger grave. La loi précise que pour procéder à une saisie administrative, le Préfet saisit le juge des libertés et informe le Procureur de la République. C’est donc sur autorisation du Juge que la saisie s’effectue entre 6 h et 21 h. Un procès-verbal de saisie doit être dressé.
Cette saisie est faite pour un an maximum au bout duquel le propriétaire donne ses arguments et un certificat d’un médecin psychiatre.
En fonction des éléments qu’il a dans son dossier, le Préfet décide de la restitution partielle ou totale ou de la saisie définitive. L’administration se plaît à dire(2) que dans le domaine des armes, le Préfet a un pouvoir d’appréciation quant à l’ordre public et la sécurité des personnes.
Pour les armes restituées, le propriétaire doit demander une nouvelle autorisation de catégorie B et procéder à une nouvelle déclaration d’armes de catégorie C ou D1 avec les documents nécessaires, sauf si ces armes proviennent d’un héritage.
Quant aux armes saisies définitivement, elles sont vendues aux enchères ou à un armurier, le produit de la vente revient au propriétaire. Si cette vente n’est pas possible du fait de manque d’acquéreur, il sera demandé au détenteur de l’abandonner pour destruction. En cas de silence, l’administration la détruira autoritairement.

- Saisie pour trouble à l’ordre public. La loi donne des motifs larges : « raisons d’ordre public ou de sécurité des personnes. » Cela peu regrouper beaucoup de situations.
Selon l’urgence, il peut aussi donner un délai au détenteur pour se dessaisir lui-même de ses armes.
Notons que dans le premier cas les armes sont vendues au profit du propriétaire et dans le deuxième elles sont simplement saisies sans indemnité. Il est incompréhensible qu’il y ait ainsi une différence de traitement entre le « danger grave... » et le « trouble à l’ordre public » ! Il y a là une véritable spoliation au mépris du droit de propriété.
Dans les deux cas il y a inscription au FINIADA. Il est alors interdit de posséder des armes de n’importe quelle catégorie y compris D2.

Restitutions douloureuses

Il est évident que les détenteurs cherchent à récupérer leur bien. Mais dans bien des cas cela s’avère être un parcours du combattant, voire impossible. Soit les armes ont déjà été détruites et donc plus de restitution possible. Soit le Préfet ou le Procureur ne veulent rien savoir, estimant que les armes du détenteur présentent un danger pour lui même ou pour autrui.

Moralité

- Soyez en règle avec vos armes. Pour les armes de catégorie C qui n’ont pas été déclarées, actuellement vous n’avez plus de possibilité de régularisation. Mais quand le dispositif de la Carte du Collectionneur sera en place vous aurez à nouveau six mois.
Vous ne pouvez pas non plus les vendre à un particulier puisque c’est au vendeur de déclarer la vente pour son acheteur. Pour cela elle doit déjà avoir été déclarée. Par contre vous pouvez toujours la vendre à un armurier.
Les armes de catégorie B détenues illégalement doivent être soit neutralisées, soit vendues à un armurier autorisé.
- Conduisez-vous en citoyen calme. Pas de dispute avec les voisins ou l’épouse.
- Rangez votre collection pour que votre domicile ressemble plutôt à un musée qu’un arsenal.
- Respectez les règles de transport en matière d’armes.
- Choisissez vos fréquentations, évitez les personnes louches qui ne vous apporteront que des ennuis.

Bref, soyez un détenteur d’armes normal et c’est tout. Ainsi, vous vivrez des jours heureux.

 

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